Après le naufrage d’un bateau qui a fait au moins 78 morts parmi les migrants, les secouristes fouillaient les mers près de la Grèce jeudi, alors que les chances de retrouver des survivants diminuaient et que l’on craignait que des centaines d’autres, dont peut-être des enfants, aient péri dans la cale du bateau bondé.
Selon les informations disponibles, le bateau de pêche qui s’est retourné et a coulé tôt mercredi matin dans des eaux profondes à environ 80 km de la ville côtière de Pylos, dans le sud du pays, comptait entre 400 et 750 personnes à bord. Selon les autorités grecques, 104 personnes ont été ramenées à terre.
Un Syrien dont l’épouse a disparu attendait devant le poste des garde-côtes de la ville portuaire de Kalamata où les survivants ont été envoyés.
Kassam Abozeed, qui réside en Allemagne, a déclaré que sa femme Israa ne l’avait pas contacté depuis huit jours. L’homme de 34 ans a déclaré qu’elle avait payé 4 500 dollars (4 124 euros) pour voyager en bateau et a montré une photo d’elle sur son téléphone.
Les corps des victimes ont été envoyés dans un cimetière proche d’Athènes pour y subir des tests ADN, les recherches n’ayant pas permis de retrouver de corps depuis plus de 24 heures. Selon les autorités gouvernementales, les chances de retrouver le navire coulé sont minces en raison de la profondeur de l’eau.
Neuf Égyptiens ont été arrêtés, selon un représentant du ministère des transports maritimes. Selon des témoins oculaires, le navire a quitté l’Égypte et a fait escale dans le port de Tobrouk, en Libye, avant de naviguer vers l’Italie, d’après la chaîne de télévision grecque Skai.
Le bateau de 20 à 30 mètres (65 à 100 pieds) aurait pu contenir 750 personnes, selon une organisation européenne d’aide au sauvetage. Selon l’Organisation internationale pour les migrations (OIM) des Nations unies, les premières indications suggèrent que 400 personnes pourraient se trouver à bord. Le HCR, l’agence nationale pour les réfugiés, a indiqué que des centaines de personnes pourraient être portées disparues.
“Le naufrage au large de Pylos est l’une des plus grandes tragédies maritimes de mémoire récente en Méditerranée”, a déclaré à Reuters Maria Clara, représentante du HCR en Grèce.
Le pape François a été “profondément consterné d’apprendre le naufrage (…) avec ses pertes humaines dévastatrices”, a déclaré le Vatican dans un communiqué. Le pape François s’est rendu en Grèce il y a deux ans pour sensibiliser à la situation des réfugiés.
Nawal Soufi, militante indépendante en faveur des réfugiés, a affirmé dans une publication sur Facebook qu’elle avait parlé avec des migrants à bord du navire depuis tôt mardi matin jusqu’à 23 heures.
“Pendant tout ce temps, ils m’ont demandé ce qu’ils devaient faire et je leur ai répété que l’aide grecque viendrait. Lors de ce dernier appel, l’homme à qui je parlais m’a dit expressément : ‘J’ai l’impression que c’est notre dernière nuit en vie'”, a-t-elle écrit.
La Grèce est l’un des principaux points d’entrée pour les réfugiés et les migrants du Moyen-Orient, d’Asie et d’Afrique.
Selon des photos aériennes fournies par les autorités grecques, des centaines de personnes ont été vues sur les ponts supérieur et inférieur du bateau, regardant vers le haut dans les heures qui ont précédé le naufrage. Certaines d’entre elles avaient les bras levés.
De nombreux manifestants de gauche se sont rassemblés à Athènes et à Thessalonique, dans le nord du pays, dans la nuit de jeudi à vendredi pour réclamer un assouplissement de la législation européenne en matière d’immigration. La police d’Athènes a fait usage de gaz lacrymogènes pour disperser un groupe de manifestants qui leur lançaient des bombes à essence.
À Kalamata, les manifestants ont défilé devant le refuge pour migrants. “Larmes de crocodile ! Non au pacte de l’UE sur les migrations”, pouvait-on lire sur une banderole.
Selon le dirigeant socialiste grec Alexis Tsipras, qui a été premier ministre de 2015 à 2019 au plus fort de la crise migratoire en Europe, la politique d’immigration de l’UE “transforme la Méditerranée, nos mers, en tombes aquatiques”, a-t-il déclaré lors d’une visite à Kalamata jeudi.